Le Dragon des Lieux [Description de l'endroit]

Imposante mais lézardée, le marbre par endroit, ne reflétant plus qu'une fatigue pourtant lustrée chaque soir par une femme de ménage.
La bâtisse est presque mausolée, ode au silence, aux pages meurtries d'hatifs passages, voilà qu'aucun bruit n'oserait troubler la sérénité des lieux.

Par endroit lumineuses, et d'autres obscures, la très anciennes bibliothèque aux allures Victorienne gémit le poids de ses connaissances, écrasant les âmes puériles de sa culture abondante.
L'endroit est réputé des lieux à la ronde, on vient y trouver les oeuvres les plus fameuses, on vient y admirer les ouvrages plus rares, enfermés dans les entrailles du bâtiment, l'arrière-boutique, la cage aux trésors dont Zahikel est le dragon.
C'est devenu son endroit favoris, reclus et isolés de tous, il peut y méditer en paix, à la lumière tamisée, aux murmures d'anciennes histoires, aujourd'hui oubliées.

La première fois qu'il vint ici, il s'était dit que sa nouvelle cage était déplaisante, mais finalement, moins vieille que lui, il s'y était attaché, comme on affectionne nos petites habitudes, rituels ridicules, qui pourtant, seront effectués chaque jours, comme pour marquer le quotidien, oublier la fuite de ce temps qu'on ne peut tromper.

Il s'y était habitué, ce cénacle était devenue son antre, son sépulcre, puisqu'après tout, il était déjà mort.

L'homme remonta rapidement les escaliers, longeant l'étroit et sombre couloir le menant à la grande salle, bien plus bondées de livres, il y en avait tant, que certains craignent d'être enseveli des poids de mots qu'ils n'avaient compris.
Zahikel sourit.
Admirant l'architecture, caressant les reliefs des murs et teintes délavées, il était roi en ses lieux, après tout, ici s'élevait son fief.

La Bibliothèque Adonis, quelle ironie, le prisonnier des enfers Grec avait ici un temple dédié, un comble qui s'ajoutait, elle était gardée par un être ailé à l'aura éclatante, un élu de Dieu, qui comme tous, avaient été en vie.

"Viendras-tu ma Persephone, m'oublier un peu de cette immortalité qui me pèse?
Ou bien l'été perdurant, je vivrai quant à moi, un hiver éternel?"

Nouveau sourire, ses doigts heurtent les ouvrages qui reconnaissent là, leur maître.
Une tête se lève ahurie, clignant des yeux comme éblouie, il lui assène un signe discret, "Silence, pauvres vies, replongez vous donc dans l'imaginaire que ne pourrait produire vos existences".
La tête n'ose soutenir son regard, et repart, empourprée, vers son labeur littéraire.

Le bibliothècaire impressionne, et ce n'est pas si mal, le silence lui, domine, éclairé d'une étrange ambiance, qu'un homme aux cheveux d'ambre et regard doré, sublime de sa présence.