Rentre chez elle..... {ouvert}

[Premier RP avec ce perso, désolée si c'est encore un peu boiteux, faut que j'apprenne à la connaître =P]

Il fait frais... La lumière tamisée de la lune balaye l'espace d'un instant une ruelle presque déserte. Un nuage passe et l'obscurcit finalement. Non loin de là, le Bar à Qui, et plus près encore, il y a de petits bars et cafés d'où s'échappe, lorsque la porte vient à s'ouvrir une musique dissonnante. Il y a encore du monde là dedans. Mais peu dehors.

L'un de ces cafés s'ouvrit finalement, ou plus précisément, une petite porte sur le côté s'ouvrit, et une silhouette élancée en sort. Elle titube un peu, puis s'immobilise, une épaule appuyée au mur. On perçoit une simple quinte de tout, puis ce qui doit être une jeune femme sous le long mais simple manteau noir se remet en marche.
...

Annah avait finit son second job de la journée. Entre midi et deux, elle avait pu dormir un peu, chez elle, et était repartie ensuite servir des boissons diverses et variées dans l'un des petits cafés du centre-ville. D'ordinaire, elle travaillait bien plus, et surtout, elle restait à son second, voire troisième boulot jusqu'au bout sans soucis. Mais la nuit dernière, elle n'avait pas pu dormir... Et à midi, c'était plus par nécessité que pour profiter de quelques heures de libres, qu'elle s'était écroulée. Elle ne toussait pas trop, en grande partie grâce à son nouveau traîtement, mais il la fatiguait un peu.
Elle était partie un peu plus tôt ce soir, sur la demande du patron, lassé de la voir inverser les commandes de ses clients. Aussi avait-elle quitté les lieux avant que ces derniers ne tournent le dos au comptoir.

Le nez en l'air, marchant paisiblement les mains dans les poches, elle laissait donc ses jambes ciselées la porter en avant. Elle semblait tomber à l'aveuglette, mais en réalité, c'était parce qu'elle savait d'instinct où elle se rendait. Enfin... Elle commençait à douter, en fait. Mais ça n'avait pas d'importance, elle connaissait la ville comme sa poche, et savait donc précisément où elle se trouvait...
Une nouvelle fois, elle leva le nez et regarda la lune. Elle n'était pas pleine, c'est dommage, le tableau aurait-été plus étrange encore avec la pleine lune. Cette rue qui serpentait sous les talons de la jeune femme, miroitant avec les reflêts de la lune d'argent, était un spectacle pour le moins envoûtant. Et Annah se laissait prendre très volontier par ce jeu... C'était bien un jeu, une interaction entre la ville et elle. Ces rues étaient les seules auxquelles elle acceptait de s'attacher. Si Annah devait s'en aller... Ces rues ne souffriraient pas. Seule, elle sortit ses mains de ss poches et ouvrit son manteau. L'air frais de la nuit s'engouffrant dans l'étoffe noire, il la souleva doucement, virevoltant dans le sillage de la jeune femme.

¤~ C'est une belle nuit... ~¤

Avec un sourire absent, elle s'immobilisa d'un coup. Elle était à mi-chemin entre le bar et son domicile. Ce sourire, il était fréquent, sur son visage. C'était celui qui prévenait qu'une crise allait venir. En fait, plus qu'un sourire, c'était un rictus contracté. Mais elle ne pouvait passer à travers totalement. Ce sourire toujours étrange aux lèvres, elle fourragea vivement dans son sac à main et en sortit un petit pulvérisateur de ventoline. Elle se mit à tousser avant de pouvoir le porter à ses lèvres. Elle ne crachait rien, pour le moment. Simplement, elle toussait. *
Avant que ça ne devienne insupportable, elle inspira une dose salvatrice.
La toux se calma sensiblement... puis reprit....
Une nouvelle dose... Elle se replie un peu sur elle-même.
Elle se calme encore. Puis le sourire crispé revient...
Nouvelle et dernière dose.

Un peu haletante, mais néanmoins calmée, elle reste courbée une seconde, puis range de ses mains tremblante la ventoline et se laisse aller sur le côté. Son épaule appuyée au mur, ses cheveux s'écoulant sur son front elle fronce les sourcils.

"Foutue maladie..."

Elle finit par se forger un sourire, tant bien que mal, puis, avec un soupir, tenta de se redresser. Elle n'avait pas vu la personne qui s'était approchée...

[Ces descriptions et ressentis sont à prendre en compte dans vos interprétations (à différents degrés, bien entendu, selon vos personnages), au même titre qu'un autre PNJ (Cupidon ou l'Injustice). Pour plus de renseignement c'est ici ]



Douce nuit, presque pure, parsemée ça et là de quelques nuages, cotons qui le dissimulent de qui pourrait le voir.
Sur deux ailes immenses, se reflète la lumière blafarde d'une lune glacée, tandis qu'un simagrée d'ange danse encore entre les courants, simulant l'amant de sa Céleste Nocturne.
Et il s'élève encore, plongeant vers ce noir infini qui semble l'aspirer, l'ensorcelant à se rapprocher des myriades d'étoiles qui l'éclairent aussi.

Danse, danse mon petit...
Vole, vole, sous nos regards ancestraux,
Vole petit oiseau chimèrique, viens à nous,
Sombre en notre lumière chaotique,
Abandonne toi enfin,
En notre sérénité aveuglante...

Et il voltige l'oiseau, trapéziste des cieux, charmeur des astres qu'il séduit de baisers imaginaires mais langoureux...
Ici il parait libre, sans pesanteur, sans enclaves, libre de tout supérieur.
Mais si l'on s'évade en nos chimères, il est bon de remettre les pieds sur terre, pour ne pas perdre, totalement, la raison.

Et c'est ce qu'il fit, se posant en cette nuit amère, en une rue discrètement lugubre, en un battement léger, aux plumes presque lustrées dont l'éclat illumina brièvement les ténèbres... Avant qu'il ne reprenne forme humaine, l'être ailé, s'habillant de son rôle de sévérité, ajustant un sobre costume, il s'apprêta à rejoindre son antre.
Mais le Destin en décide autrement, et sema sur sa route, une de ses âmes qu'il attirait étrangement.

L'homme fronça les sourcils, une part d'échappée vaut son lot d'embardée, allons, allons Zahikel, vas donc t'atteler à cette tâche qui t'enchaîne.
Eclairer les âmes torturées.

Et devançant craintes et désarrois l'homme s'avance et son aura apaisante avec lui, magnétisme assuré et contrôlé, il se veut réconfortant, tranquillisant, la toux de la jeune femme lui faisant face s'est calmée complètement, et si voilà peu, elle était épuisée, la voilà requinquée soudainement d'une étrange sérénité.

"Mademoiselle? " une marque posée.
"Ephie, c'est bien cela?" contrant toute peur, il reprit rapidement
"Il m'arrive de côtoyer ce bar, j'ai cru y entendre votre nom. Avez-vous besoin d'aide?"

Pas de sourire charmeur, une mine sérieuse et appliquée d'un maître consciencieux.

"Je suis monsieur Kadamon, le bibliothècaire" se présenta-t-il poliment, s'inclinant très légèrement à la manière d'un gentleman.

Le vent murmurait ses caresses… Il les murmurait, les laissait se couler dans la ruelle. Tout, hormis l’ombre fugitive des nuages qui dansaient avec paresse sur l’asphalte, s’était immobilisé. S’était glacé. Annah, une main restée appuyée sur le mur à sa droite, avait levé un regard vague à la réception qui se donnait, en haut. Une réception à laquelle nul n’était convié. Qui était donc capable d’aller danser là-haut avec ces géants immatériels ? Sûrement pas elle. Elle n’avait pas la prétention de ne serait-ce que songer à aller y faire un tour. Elles pouvaient paraître décalées, ces réflexions, dans une telle situation. Mais elles lui permettaient d’oublier qu’il lui était aussi difficile de réguler sa maudite respiration. Avec son regard, c’était son esprit qui voltigeait là-haut. Il laissait loin derrière lui ce corps épuisé.
Finalement, elle baissa la tête, retournée dans ce monde de béton froid et commun. Elle y était attachée à ce monde, quelque banal qu’il puisse être. Il était celui qui le mieux faisait échos à son mal. Celui en qui elle avait une confiance inébranlable. C’était ici que tout s’était déclaré pour elle, que, privée de famille, elle avait grandit. Ce simple mur contre lequel elle s’était appuyée… il l’avait soutenue. C’était comme si cette ville était une personne qui la protègerait. Elle pouvait compter sur ses ruelles, s’amuser de ses ombres et de leur danse. Elle pouvait y cracher son mal et sa vie sans craindre les questions. Cette ville ne posait pas de question elle… aidait.

Lentement, elle se laissa tomber en avant. Un premier pas. Elle ne devrait pas rester là, ici. Les gens allaient sortir des cafés, les uns après les autres, et même pour une ombre de cette ville, ça pouvait être un peu dangereux. Il y avait des lieux où elle pourrait se reposer, profiter du spectacle du vent s’engouffrant dans les nuages… Sa main toujours crispée sur le sac où la précieuse ventoline tressautait, elle laissa un fin soupir lui échapper. Elle se sentait un peu mieux, déjà. C’était souvent comme cela, après une crise peu violente : son énergie, bafouée par la toux, l’assaillait derechef, avec fougue, comme pour compenser. Quelle étrange maladie. Elle était un excellent moyen de tenir debout, de faire bonne figure, en dépit de ce petit démon qui rongeait ses poumons. Ainsi, mis à part cette maigreur louche, elle parvenait à en masquer les effets les plus influents. Mais ce n’était pas qu’à ce regain d’énergie, qu’elle devait ce rétablissement presque impulsif. Le renversement de ce cycle d’énergie lui avait également été inspiré par quelque chose d’étranger. En Annah, c’était comme une sorte de chaleur qui s’exprimait à volonté en son être. Elle n’avait que très rarement connu ça, et uniquement avec des personnes pour le moins exceptionnelles. D’autant plus qu’en cette nuit plutôt fraîche, toute idée de réchauffement était exclue. Ces personnes qui avaient eu le moyen de donner de la force à Annah, cette dernière s’en était éloignée. Elle ne les avait pas fuis, à proprement parler, mais… Elle n’avait pas voulu que ce lien, cette sensation finisse par se parer d’une dépendance, de quelque côté qu’elle naisse. C’était son angoisse la plus prenante. Plus que la mort, à l’idée de laquelle elle avait fini par se faire, en voyant le peu d’espoir qu’avait nourri son père pour elle, celle de laisser derrière elle des êtres qui lui auraient fait du bien la gênait… Elle ne voulait laisser personne comme elle-même avait été laissée.

Mais en une telle nuit, et suite à une telle crise, une telle chaleur était à prendre. Aussi son amorce de pas tanguant avorta-t-elle. Elle hocha la tête, ses yeux gris dans lesquels les ombres des nuages dansaient fixant une silhouette, face à elle. Au vu de la taille et de la carrure de la personne, il devait s’agir d’un homme. La voix qui s’éleva alors confirma sa supposition.
Au « Mademoiselle », elle leva le nez et se forgea un sourire vaguement interrogatif. Son visage se débarrassait petit à petit des stigmates de sa crise. Elle finit par recouvrir sa douceur. A la lueur lunaire, sa peau semblait faite de porcelaine. De porcelaine. Il en aurait fallu fort peu pour la briser.
Son surnom, en revanche, la surprit plutôt. Ce surnom, il était connu de quelques rares personnes. Ses photographes, ses patrons divers et variés. Il confirma, une fois de plus, sa supposition. Dans ce bar. Pourtant, il ne venait pas du bon côté. Le bar… il était derrière elle. Elle secoua la tête, elle devait faire erreur. Et puis, cet homme semblait bien… strict. Après tout, il semblait bien différent de ces types qu’elle croisait tous les soirs. Elle n’était pas d’un naturel craintif, ayant grandit ici. Elle adopta elle-aussi un comportement plutôt neutre. Mais lorsqu’il se présenta, et s’inclina, elle ne pu retenir un haussement de sourcil éloquent.

¤~ Bibliothécaire ? ~¤

Il était pour le moins étrange de croiser ici un bibliothécaire. D’autant plus qu’elle ne se souvenait pas d’avoir fréquenté la moindre bibliothèque dans ce cartier. Elle toussota, et bien vite s’arrêtant, sachant qu’un toussotement pouvait la conduire à des quintes plus violentes.

« Hm… Enchantée… Kadamon ? »

Il était énigmatique, à ses yeux, mais elle ne pu retenir une sorte d’attraction. Cet homme, elle avait bel et bien l’impression que c’était de lui que venait cette chaleur. Pourtant, son visage était si froid… Elle plissa les yeux et fit un pas en avant, un pas encore un peu trébuchant.

« De quelle bibliothèque, au juste, êtes-vous le gérant ? »

Avec un sourire gêné, elle cligna des yeux…

« Pardonnez ma curiosité… Elle peut vous paraître déplacée »

Discrètement, elle s’était rapprochée du mur. Sa main s’y posa, délicate et blanche, et elle y transféra une bonne partie de son poids, afin de tenir avec un peu plus d’aplomb.

Habitué à la manipulation délicate d'espérances fragiles, Zahikel était tel un restaurateur des âmes, et celles qui brillaient d'une faible lueur, se rehaussaient d'un peu plus de vigueur, d'ardeur, de conviction.
Était-elle plus forte par la suite? Aurait-elle vaincu tout ses démons, cette âme?
Il n'en serait pas le bourreau, il n'avait pas à trancher le dernier mot.
Cette fragile lueur le resterait, mais au moins, aura-t-elle aperçue, au loin, ce brasier brûlant sans fin, puisque ce cadeau fut fait à Pandore, maîtresse des maux...

Un autre présent fut accordé aux créatures imparfaites: le rêve.
Leur permettant de plonger leur vie d'un opium éphémère, de dépeindre un réel plus glorieux, d'y ajouter nombre de touches plus colorées, requinquant l'âme à sa réalité, mais l'homme ne s'accordait plus le droit de rêver...
Culpabilisant sur le fait même d'être probablement trop faible pour en réaliser, ne serait-ce qu'une poussière, de ses rêves ouverts.
C'était l'une des raisons de sa présence, de sa perpétuité, l'une des raisons de ses nombreuses absences, occupé à s'immerger en une innocence rêvée non déchue...
Zahikel avait le rôle du dieu rêveur, il devenait un Morphée de la vie, tâchant d'être un soulagement, ou une éclaircie fugace, sur ces étincelles meurtries.

Cette âme-ci, vacillait, tentant de lutter contre un vent flagorneur, qui l'éreintait de l'intérieur, et elle de s'accrocher à s'en consumer. Ses yeux s'adoucirent, l'homme esquissa même l'ombre d'un sourire.

"Je suis le tenancier des enfers, l'amant de leur reine"
Une brève pause.
"Garant de la bibliothèque Adonis", lança t-il d'un regard acéré, comme profilant sur la jeune femme, le miroir des abysses...
Il reprît:

"Nul ne serait déplacé, que d'être rassuré d'une entité qui nous fait face.
L'être humain est à la constante recherche d'une réponse, tentant d'analyser tout ce qui serait à sa portée, dans une course effrénée au savoir.
Le serpent eut-il raison d'accorder ce fruit?
Ignorant, est ce que l'homme était-il plus heureux?
Cherche-t-on peut-être, simplement, à se rassurer de nos existences? Une accroche qui ne dépendrait que de nous, que l'on pourrait maîtriser, sans incidences immatérielles, sans hasard ni impuissance, un destin, un présent, que l'on contrôlerait.
Mais, pourtant, ce fil d'inconstant, nous rend tel que nous sommes: imprévisible.

"Il est grand temps de rallumer les étoiles."

Susurrait Apollinaire.
Peut-être serait-il temps, que l'homme accepte qu'il n'est qu'un grain, mais, cela l'empêche t-il de sculpter les plus belles dunes?
Et par delà, les ténèbres les plus dense, l'on distingue les étoiles."

Il tend la main vers elle, comme le flambeau d'un relais, lui proposant vaguement de s'appuyer un court instant sur lui, le temps de se retrouver, ou de se perdre, le temps d'un instant, éphémère.

Lorsque Zahikel prit à nouveau la parole, Annah sentit une fois de plus cette sorte de chaleur qui s'insinuait en elle. C'était comme si ses poumons se souvenaient, l'espace d'un instant, de leur état d'antan. Bien que sa main lui fut encore nécessaire pour tenir debout, en face de lui... L'autre se décrispa lentement, lâcha le sac où reposait la ventoline pour s'étendre le long de son corps. Deux petits coups de sa main droite, et elle tint debout sans l'aide du mur. La stabilité n'était toujours pas de mise. Elle s'était arrêtée plus tôt ce soir... parce qu'une fois n'est pas coutûme, la fatigue s'était faite ressentir. D'ordinaire, elle faisait son possible pour tenir un peu plus, quitte à s'effondrer sitôt chez elle. Mais là, c'était au-dessus de ses forces, et elle n'avait eu d'autre choix que de filer sous cette lune d'argent. Et là... Là sa fatigue, qui n'en démordait pas pour autant, s'était transformée en un poids langoureux, toujours présent mais plus doux, plus supportable. A cette sensation étrange, s'étant emparée de ses entrailles, elle porta une main à sa gorge, s'étonnant de sa respiration presque silencieuse.

¤~ Ca va mieux depuis... Qu'il m'a parlé. ~¤

Mais aucun rapport, c'était impossible. Quel homme, de par sa simple présence, soignait un tel mal? Bon, soigner était un verbe bien trop fort, elle le sentait, au fond d'elle-même. Il était toujours là, tapis attendant qu'à nouveau elle se retrouve seule pour surgir et lui faire payer son bien-être éphémère. Mais il arrivait à supplanter ces sensations par ce qu'elle aurait bien aimé appeler une aura. Mais si elle se sentait comme apaisée, mettant de côté la maladie l'espace d'une seconde, les propos que tint cet homme étrange lui firent hausser un sourcil éloquent. De quoi parlait-il, au juste? Le gourou d'une secte? Cette idée, contre toute attente, la fit rire un peu. Son rire habituel, aux sonorités douces, pas moqueuses... Mais au regard teinté de tristesse et de résolution. Elle s'était permis ce rire grâce à ce similis de sourire, sur le visage de cet homme "apaisant" Cela pouvait sans nul doute paraître déplacé mais... Mais elle n'avait jamais eu peur de rire face à un inconnu. Elle n'avait jamais eu peur de grand-chose face à un inconnu, en général... Elle n'était pas une menace, et savait adopter son comportement à un grand nombre d'inconnus... Petit papillon de nuit.
Cet homme, il l'avait appelé Ephie, il était donc lui aussi une sorte de nyctalope, de quelque sorte que ce soit. Et puis, les enfers ne devaient guère s'ouvrir à la lumière du jour, non?

Son rire, bref mais franc, mort, elle se contenta de laisser sur ses lèvres flâner un petit sourire.

"Vous parlez fort bien, Kadamon. Fort étrangement, mais fort bien"

Elle se passa une main sur le front, elle avait rarement eu à répartir quoi que ce soit à de la poésie parlée. Il s'agissait bien de cela. A l'allure de cet homme, et à cette "aura", elle ne doutait pas que cela devait être plus ou moins naturel, mais pour elle... Ce n'était pas son verbe qui payait ce qu'elle pouvait se mettre sous la dent.

"Je ne sais pas si l'homme est heureux dans l'ignorance... Mais si elles sont en mesure de lui assurer un type de confort... immobile, le savoir peut être d'une saveur bien plus agréable"

Son sourire se fit un peu plus distant, elle leva le nez au ciel. Les étoiles. Elle n'étaient pas très nombreuses, ce soir là. Sans doute dominées, et de loin, pas la lumière de ce magnifique disque d'argent.
Annah, le visage plus pâle encore sous cette lumière pure, reporta son attention sur Zahikel. Cet homme, aux propos étrange, lui tendait la main. Alors son malaise était si visible que cela? Il aurait été sage de la refuser, sobrement. Après tout, les rencontres à faire à cette heure étaient moins recommandables les unes que les autres. D'autant plus lorsqu'elle évoquaient les enfers, qu'elles avaient ce regard perçant... Un regard qui semblait s'insinuer à même son âme. Et pourtant, elle préféra se fier à cet apaisement qu'il faisait naître en elle, et tendit simplement une mains pour saisir celle qu'on lui proposait et s'y appuyer un peu. Elle était d'un coup bien plus stable... Le visage baissé en signe de remerciement, tremblant un peu moins, elle ajouta d'une voix un peu absente.

"Les étoiles d'Apollinaires ont dans les enfers une place de choix? Qui aurait cru que leur lumière irait jusque là"

Elle sourit, décidant de jouer le jeu de cet homme étrange, sans pour autant s'y laisser entraîner totalement.

"Dois-je me contenter, alors de cette réponse là? Croiser la route d'un fonctionnaire de l'Hadès, un soir de pleine lune, c'est... banal ?"

Elle lui sourit avec simplicité, s'attendant au nouveau mot d'esprit de Kadamon. Elle n'était pas très spiritualiste, mais il n'y avait dans sa voix ou sur son visage pas de grande raillerie, ni de scepticisme. Elle restait neutre. Après tout, une personne normale n'aurait pas pu apaiser ainsi sa respiration. Pas à ce point du moins. C'était peut-être simplement pour prolonger cet état là, qu'elle entrait dans le jeu de l'homme.

Jefferson s'était fondu dans le vent. Il lui semblait même devenir ce vent. Il s'engouffra dans la ruelle en direction de SA mission; la plus belle, la plus noble de toutes les missions qui lui ait été donnée d'accomplir. Tout au long de sa vie, on lui avait demandé d'ôter des vies. Désormais, il est passé de l' autre du côté miroir et il doit en sauver une, rien qu'une seule d'après ce que l'on lui avait dit.

*UNE vie contre toutes celles que j'ai prises?*

Le deal lui sembalit bien léger.Cette vie là valait tant que cela? Jefferson, en bon militaire, avait bien étudié son dossier. Tout ce qu'il y avait à savoir, il avait noté.Certes, elle était spéciale cette Ephie. mais à quel point?

*Mais comment je vais m'y prendre? En plus, ils m'ont collé des ailes grises. elle va s'enfuir en courant quand elle va me voir débarquer. *

Il fût tiré de ses pensées en appercevant Zahikel au loin. Jefferson s'empressa de baisser les yeux, réajusta son chapeau et pressa le pas,. La ruelle était brumeuse. Une jeune fille appuyée contre un mur, tronaît au milieu de ce décor irréel, les yeux comme épinglés en direction du ciel. Jefferson n'eût aucun doute c'était forcément elle Il sentait comme une chaleur au fond de ses tripes, comme si cette vision venait de le lier à la jeune femme pour le meilleur comme pour le pire.

*Et moi qui m'était juré de ne jamais me marier.*

Il deboutonna son par-dessus pour que le vent s'engouffre à l'intérieur.

*Là, il faut que je la joue super classe, surtout que le boss est là et qu'il n 'a pas l'air d'aprécier les plaisanteries.*

[i]Il déploya ses ailes, qu'il commencait à peine à maîtriser et s'avanca auprès de la jeune fille. Il essaya de prendre une expression à la fois solennelle et rassurante. Et d'une voix ferme, il murmura dans le vent: afin qu'il porte son message dans le creux de l'oreille de la jeune femme:[/]

"Bonsoir, Ephie! Je me nomme Jefferson et je suis tes ailes"

Sentant un regain d'énergie affluer, sitôt la main de Kadamon saisie, elle sourit et s'approcha un peu. Elle écouta avec attention ce qu'il lui disait, sans manifester de réaction quelconque. Un homme amnésique à imaginer... C'était une belle formulation, mais qui n'en appelait pas d'autres. Intérieurement, elle souriait bien plus que ce qu'elle laissait voir : elle se sentait un peu réhaussée par ce que lui disait cet homme étrange. Elle ne considérait pas ses mots comme "parole d'évangile", elle ne le connaissait pas et n'avait pas cette naïveté, quelque bien que lui procure sa présence. Mais elle les trouvait beau et, pour elle, ils étaient dotés d'une sorte de vérité. Elle s'en était rendue compte. Plus observatrice qu'actrice, elle avait vu cela sur son entourage, son entourage le plus proche. Les hommes, passé un moment, peut-être par tristesse, par désespoir, ne voyaient plus que ce qui se déroulait sous leurs yeux. Ils ne savaient pas imaginer le beau dans le laid, ne savaient pas voir l'impensable dans un cul-de-sac : une issue, plus sûre qu'un demi-tour. Ils ne savaient pas voir dans le regard d'une petite fille malade l'espoir de vivre. Et ces hommes, oublieux, ceux dont les rêves s'étaient transformés en chimères... Ils dépérissaient.
Son sourire trembla un peu, elle pensa alors à son père. Son père qui n'avait pas eu confiance en sa guérison. Elle n'était pas guérie, non en effet mais... Mais elle ne se laissait pas mourir. Elle refusait de se laisser alanguie. Le petit éphémère brûlait, un peu plus fort, avec un peu plus de lumière, jusqu'à ce que l'épuisement ne se saisisse finalement d'elle. Elle était comme ça, tout le temps. Croncrêtement, elle mourrait, tout doucement, et ce contre les efforts de ses médecins traitants. Mais ça n'avait pas d'importance. Ce qui était inéluctable n'avait pas d'importance. A quoi bon en accorder à quelque chose qui n'a pas besoin d'attention pour vivre? Ce à quoi elle s'adonnait, c'était plutôt à l'espoir. Parce que ça, c'était fragile. Ca, ça avait besoin d'elle pour subsister. Elle l'abritait, comme la main protège une flammèche. Avec un sourire un peu absent, elle reporta son attention sur Kadamon. Elle ne lui répondrait pas. Elle n’avait pas pour habitude de parler pour « meubler ». Le silence ne lui était pas désagréable outre mesure. Décidément, c’était beau, ce qu’il disait, cet homme. Sur la lumière céleste. Alors, cette voûte se parait comme une jeune femme ? Jamais plus belle que lorsqu’elle se trouvait caressée d’un regard ? Ca fit sourire Ephie, jeune esthète… un petit papillon qui souvent s’évadait dans ce ciel d’encre. Le jour n’avait pas le charme de la nuit, à ses yeux. Un ciel bleu n’avait pas le charme changeant d’un ciel gris, brumeux. Ou d’une nui claire.

Elle hocha simplement la tête, en direction de Kadamon, et son sourire ne s’évanouit que lorsqu’il lui parla d’ailes. Elle ne saisissait pas tout. Que pouvaient bien signifier de tels propos ?

« J’aurais mes ailes ? En quel honneur m’octroierait-on des ailes, au juste ? »

Elle sourit. Elle ne croyait pas à tout cela, pour elle, cet homme était simplement une présence chaleureuse, une présence chaleureuse en plein délire… Elle lui sourit, elle n’était pas affable, mais pas non plus défiante.

« Octroyez-en donc à des gens qui en désirent, ou qui en ont besoin »

Des ailes… pour elle, c’était la mort. Ca signifiait disparaître. Sa mère, dans la tête de la petite fille qu’elle avait été… Elle avait eu des ailes. Elle ne voulait pas de ces ailes. Elle espérait encore ne jamais en avoir. Mais ça, elle ne le lui dirait pas, quelque loquace que soit ce Kadamon. Elle aimait écouter, mais restait laconique, sitôt qu’il s’agissait d’elle. Quel besoin aurait cet homme de connaître ses peurs, de connaître son mal ? Il l’avait vue tousser, bien sur mais… Il n’avait pas vu de vraie crise. Après tout, elle pouvait tout aussi bien avoir attrapé un virus… Un « gros » virus. Ses sourcils frémirent un peu, mais elle conserva son sourire. Quand elle perçut autre chose. Une autre chaleur, un peu moindre celle-là, qui vint s’insinuer en elle. Elle était étrange cette nuit… Et voilà qu’il y avait aussi du vent. Elle referma son manteau, lâchant la main de Kadamon, mal à l’aise.
Toute entière à ces ambiguïtés, à ce froid et cette chaleur, ce bien-être fictif et ce malaise profond, elle balaya la ruelle du regard, et observa, baignant dans une lumière d’argent, un autre homme. Un guet-apens ? Voilà qu’ils étaient là, tous les deux à croiser sa route… Elle fit un pas en arrière, le visage toujours neutre, et s’appuya à nouveau au mur. Son manteau, refermé, bloquait un peu sa respiration accélérée.

Elle plissa les yeux avec un rictus, et se figea. Il lui parlait, le nouveau venu. Sa voix n’avait pas les accents « mystiques » de celle de Kadamon. Jefferson ? Le nom non plus n’avait plus rien de mystique… En revenche…
Elle leva une main au-dessus de ses yeux et fit de nouveau un pas en arrière… Ses ailes… ? C’était ça ? Son bras droit plaqué au mur, elle le regardait d’un air incrédule.

« Bon sang, qu’est-ce que c’est que cette histoire… ? Mes ailes ? Eh ! Vous voulez dire quoi, là ? »

Elle s’adressait aux deux hommes, et son regard allait de l’un à l’autre. Elle aurait pu partir en courant, bien sur mais… Mais elle voulait savoir, avant. Savoir ce que ce type ailé lui voulait, et quel lien ça avait avec Kadamon ? Il n’avait pas d’ailes, lui, pourtant… ? Et cette chaleur ?

Elle replia ses bras sur son ventre, un peu prostrée, sans lâcher de son regard gris Jefferson. Elle ne le distinguait pas bien. Mais il avait de grandes ailes grises, et quelque chose lui disait que c’était ce qui importait le plus, en cet instant.

Jefferson assistait à la fin de la discussion entre Zahikel et Annah. Un immense malaise l'envahit comme si les portes de l'enfer allaient s'ouvrir sous ses pieds et qu'il allait sombrer dans un feu ardent et cru. Le feu le rongeait bien,mais dans son coeur. Zahikel ne lui avait pas même lancait un regard. Cet être mystérieux le terrifiait. Et ce sourire, ce sourire presque imperceptible que voulait-il dire? Jefferson cherchait une solution, essayait de deviner ce que pensait Zahikel. Vains efforts, plus il pensait moins il comprenait, moins il comprenait plus il avait peur. Lui, "Crazy", l'homme de tous les défis mourait de trouille pour la première fois de son existence. Non pas parce qu'il avait la sensation d'avoir commis une erreur, non tout simplement parce qu'il ne saisissait pas qui était Zahikel, il ne saisissait pas le sens de ses paroles, la signification de ses geste."

*Il n'y a pas d'anges qu'il a dit. Alors moi je suis quoi, les âmes tremblantes et perdues? Et puis pourquoi il n'est pas resté, il aurait pu m'expliquer deux, trois trucs, il doit s'y connaître en sauvetage de mortels... Et puis pourquoi il lui a embrassé la main, je croyais qu'ils ne le faisaient que dans les films. Et moi je fais quoi maintenant? Et pourquoii il a souri? Peut-être qu'il ne me souriait pas? Peut-être qu'il était juste content. Non, il n'a pas une tête à être content.*

Plus il se posait des questions, plus ils s'enfoncait dans des abysses sans fond. Tout un coup, il lui revint à l'esprit qu'il était là pour s'occuper d'Annah. il leva les yeux dans sa direction pour vérifier qu'elle était toujours là, car il n'avait absolument aucune idée de depuis combien de temps il était perdu dans ses pensées. Elle était toujours là, prostrée, les bras sur son ventre et elle le fixait de ses yeux gris et intenses. Ce regard finit de liquéfier le malheureux Jefferson. Personne ne l'avait jamais fixé de cette manière.[i/]

*Elle te regarde mon pote, je te dis qu'elle te regarde. Faut que tut trouves un truc à faire, et vite. Sinon elle va se tirer, et tu sais qu'il ne faut surtout pas qu'elle fasse ca. Fait la rire, faut que tu la fasse rire ; il paraît qu'il n'y a que ca qui marche.*



[i]Jefferson tenta d' esquisser un sourire pour masquer sa mine décontenancée et sur un air un peu fanfaron, lanca

"Il fait quand même un peu flipper ce mec non? Bon ben si tu as des questions n´hésites pas mais surtout pas en bio, j'ai toujours était nul dans cette matière. Allez je t'écoute"

La main qui saisissait la sienne, l'instant d'avant un soutient, était devenue un lien. Elle ne se débattait pas, mais sentait bien qu'il la retenait. Par ce geste, mais aussi par ses mots. Plus que ceux prononcés avant, ceux-là trouvaient en elle un échos particulier. Sous les métaphores, elle saisissait le sens, et c'était un sens pour le moins troublant. Elle n'y répondit rien, mais cela souleva en elle des pensées multiples. Que pouvait-elle accueillir de nouveau quand son constat était si sombre? Non elle n'était pas morte, pas encore... et peut-être pas de sitôt mais... Elle avait cette épée de Damoclès au-dessus du crane, et quoi qu'en dise cet homme mystérieux... Ses poumons contractés suffisaient à le lui faire entendre. Combien de temps est-ce que ça allait continuer? Jusqu'où allait-on faire reculer ce mal?

Elle fronça les sourcils, laissant ses dents apparaître. Le souffle irrégulier, mais à peu près silencieux, elle songea alors à ces âmes tremblantes et perdues... C'était elle, ça? Question idiote, sans doute... Mais elle lui trôtait dans la tête. Etait-elle seulement perdue? Au sortir d'une crise, pourquoi pas. Mais là, étrangement, mis à part la scène qui était en train de se dérouler, elle ne se sentait pas "perdue" à proprement dire.
Elle n'en avait pas l'impression. Cillant, elle regarda sur le côté, ses yeux plus ternes. Et s'il avait raison... Si elle était effectivement sur un sentier dont elle ignorait tout... Qu'est-ce que ça changeait? Trois vers et elle était supposée se munir de la carte? Cette lumière, celle à laquelle elle pensait, n'était pas à sa portée pour le moment. Et si quelqu'un devait la braquer sur elle, ça serait un médecin. A défaut de tout ça, elle s'approchait d'une lumière plus matérielle, moins pure. Petit papillon de nuit elle vient battre de ses ailes blanches au ras des projecteurs d'un studio. Cette vie là était un substitu à la santé? Peut-être lui donnait-elle l'impression de vivre, quelque part. De rattraper ce qu'elle manquait. Elle risquait de s'y brûler, à trop s'en approcher.

¤~ La flamme ne me brûlera pas cette nuit, Kadamon ~¤

Elle avait un peu d'amertume. Cet homme lui parlait trop. Au départ, elle trouvait sa chaleur réconfortante mais à présent... A présent elle se sentait à nu. Elle avait l'impression qu'il déroulait sa vie comme elle ouvrait un magazine dans les salles d'attente de ses traitants. Rester fière. Pour elle, c'était rester digne, c'était de pas se laisser aller à la catharsis (oulah l'orthographe) Elle ne voulait pas de pitié, pas d'attention. Elle voulait rester une fille maigrichone, épuisée par ses boulots.
Sans doute hyper-active, non?
Oui.
Elle bouge à droite, à gauche.
Et puis pas très sociale.
Mais sinon elle est gentille, elle cherche pas d'ennuis...
Mais elle écoute, c'est surtout ça, en fait...

Elle voulait rester ça. Simplement, une image qu'on ne connaît pas, qui n'invite pas à la curiosité, mais qui s'offre à certains. C'était aussi pour ça qu'elle aimait la photo. Une photo, c'était une image fidèle. C'était un moyen de "dire son mal" sans le dire. D'exposer l'invisible. Un médecin aurait vu, et encore... Mais ceux qui voyaient les photos, non. Ils ne la plaignaient pas, ils ne plaignaient jamais Ephie, parce qu'après tout, il n'y avait pas de quoi le faire...

Sentant Kadamon élever sa main, elle fut pour le moins surprise, et eut un mouvement de recul, léger, qui avorta lorsqu'il la lâcha. Il mettait de la douceur dans sa retraite... Il s'en allait. Elle ne le retint pas, et ne dit mot. Le voyant croiser cet autre homme... Celui-là pourvu d'ailes, elle fronça les sourcils.

Abandonnée par la chaleur de l'énigmatique bibliothécaire, elle se sentit un peu défaillir mais autre chose pointa alors. Il était loin, cet homme. Mais elle sentait tout de même quelque chose. C'était aussi de la chaleur, mais pas de la même nature. Celle là un peu plus respectueuse, inexpérimentée. Mais quoi qu'il en soit, Annah était retournée par ce que lui avait dit Kadamon. Aussi, en dépit de la discrétion de cette chaleur là, se tint-elle sur ses gardes. Il ne semblait pas particulièrement agressif, cet homme. Un peu vulgaire, à la limite.
Elle le regarda en silence, ne sachant pas trop quoi dire, elle non plus. Il ne s'était pas encore avancé. Elle ne pouvait lâcher ses ailes du regard. Elles n'étaient pas blanches, ce fut tout ce qui lui vint à l'esprit.

Lorsqu'à nouveau la voix de Jefferson s'éleva, elle eut un mouvement de recul supplémentaire, muette. Un peu abasourdie par ses mots, elle haussa un sourcil, abaissant tout à la fois son visage.

¤~ En... bio? Mais de quoi il parle, au juste? ~¤

Elle chercha, puis finit par relever la tête. Des questions? Par quoi commencer... Ces cinq dernières minutes, elle s'était posé un nombre incalculable de questions.

"Ce... type... Et toi... Pourquoi vous-êtes là, concrêtement?"

Elle plissa les yeux et évita son regard (de toutes façons, elle ne le percevait pas clairement, dans l'obscurité)

"Je n'ai jamais demandé d'aide"

Elle devait lui paraître crue. Pourtant, ce n'était pas son but. Elle n'aimait pas particlièrement heurter les gens mais là, elle se sentait acculée, à vrai dire. Au pied du mur, elle n'avait trouvé que ça. Elle avait peur.
De plus... Personne n'avait sauvé sa mère. Pourquoi aurait-elle une chance avec eux, elle?
"Les anges, ils sont pas très forts" Cette phrase, elle venait de loin, déjà... Elle l'avait dite à son père, le jour de l'enterrement de sa mère. Elle trôtait dans sa tête, là. Ce n'était pas un ange alors...?

"Et si vous n'êtes pas un ange... Alors quoi?"

Elle ne bougeait pas, mais tout dans son attitude montrait qu'elle était prête à battre en retraite...

Jefferson s'attendait à ce que sa jeune protégée lui pose ce genre de questions, et c'était justement ce qu'il redoutait. Il se concentra pour avoir l'air le plus relâché possible . Jefferson pensait que s'il avait l'air détendu, Annah s'habituerait à lui. Le pire de tout serait qu'elle refuse qu'on l'aide, or a priori elle était assez réticente. Le gardien, pour se donner du courage, se dit que si elle était restée, c'est que finalement elle accepterait.

"Oh, jeune fille, ne m'insulte pas je ne suis pas un quoi d'abord. En plus tu devrais être heureuse, je suis un peu comme un ange mais en plus classe et en plus éfficace. Tu les as vus avec leurs auréoles, leurs robes de tar... enfin de...euh...d'anges quoi. Et puis, leurs petites ailes blanches trop bidon, regardes un peu les miennes."

Jefferson déplia ses ailes et avanca un petit peu en direction d'Annah pour bien les lui momtrer.

"Tu vois la classe. Et regardes ca!"

Jefferson désignait par "ca" son costume qu'il montrait à la jeune fille.

" Tu as vu, je me suis mis sur mon 31 pour venir te voir. Je me suis pas foutu de toi, costard italien de chez Georgio Armani, et le chapeau il vient de Paris."

Le gardien réflechit un instant. Il avait vraiment l'air de chercher quelque chose d'important

"Je ne sais plus qui l'a fait mais c'est la classe quand même"

Jefferson se mit à rire. Il venait de s'imaginer en robe blanche.

"Sans compter que je sais beaucoup mieux voler qu'eux ; d'ailleurs pas loin d'ici, il y a un terrain de l'U.S. Air Force, on ira leur piquer un taxi et je te ferais ton baptème de l'air."

Il s'arrêta un moment pour se repasser en mémoire la vie d'Annah.

*Ah oui, la mère, c'est pour ca qu'elle peut pas les encadrer. Il aurait peut-être fallu que je me renseigne. L'ange dont elle parlait c'était peut-être un gardien.*

"Oui je te disais quoi déjà. Ah oui je te disais que je n'étais pas un ange. Techniquement, je suis un gardien, enfin c'est comme ca qu'ils nous appellent. Chaque gardien s'occupe d'une personne , jusqu'à ce que la personne aille mieux ou...."

Jefferson hésita puis poursuivit.

"Ou meurt. Mais là autant te dire que les choses se gátent sérieusement pour le gardien, et ca j'y tiens pas des masses vois-tu?"

Jefferson sentait qu'il n'était pas très convaincant et qu'il manquait de tact mais il ne savait rien faire d'autres que d'aller droit à l'essentiel.

"Bon je sais les anges, les gardiens, les protcteurs et tout ca, c'est pas trop ton truc à cause de tout ce qui t'es arrivé avant. N'empéche que moi les anges, ils m'ont pas loupé, non plus, tu crois que je serais ici à te parler s'ils avaient leur boulot? Ben non! Je serais peinard en plein ciel en train de faire des loopings vois-tu? Alors moi aussi, je les aimes pas trop."

Jefferson se tût, se calma, car le fait d'avoir repenser à sa mort l'avait quelque peu ulcéré. Tout d'un coup, il sentit qu'il avait faim.

" Alors, pourquoi toi, ben je suppose qu'ils ont estimé que tu en avais besoin. Moi ils ne m'ont pas brieffé sur le sujet, ils ne m'ont même pas demandé mon avis. J'étais peinard dans mon taxi. Olala , tu l'aurais vu mon taxi, il était magnifique. J'avais fait peindre mon emblème sur sa carapace avec des flammes à l'arrière et de petites étoiles bleues à l'avant, et dire que maintenant il est en cendres au milieu de l'Océan Indien. Je leur ai demandé de me le rendre pour mieux faire mon boulot de gardien, ben tu ne me croiras pas ils n'ont pas voulu. Je te disais quoi déjà, ah oui donc j'étais dans mon taxi et la seconde d'après on me sortait qui fallait que je t'aide. Et crack me voilà! Ah oui, l'autre type, le bibliothéquaire là, tu veux savoir pourquoi il est venu te voir. Ben, je ne sais pas trop je le connais pas moi ce mec. J'en ai juste entendu parler, je suppose qu'il venait te dire que j'allais m'occuper de toi. Bon c'est pas tout mais moi, j'ai un peu la dalle quand même alors si on pouvait aller manger un bout ca serait cool, mais un coin discretos car les gens ne peuvent pas me voir alors le coup des couverts qui bougent, on le fera quand j'aurais fini ma mission."

Un grand sourire éclaira le visage du gardien. Elle avait souri, il savait que ca n'était pas gagné mais au moins il avait progressé. Comme un grand soulagement parcoura le coeur du gardien, une certaine fierté plus exactement, il trouvait qu'il s'en était pas mal sorti pour un novice. Il pensait même qu'il se débrouillait mieux mort que vivant.

"Yes, ca t'as raison, c'est une histoire de dingue. C'est loin chez toi, parce que moi je suis affamé. Tu vas voir je suis un vrai cordon bleu."

Jefferson tournait autour de sa protégée en faisant des grands gestes, mais il restait tout de même à une certaine distance. Il n'avait jamais aimé les contacts physiques avec les autres.

"Tu sais, je ne suis pas un gardien comme les autres. Moi je suis super balèse, tout ce que je fais, ben crack, je le réussis. Bon d'accord sur mon dernier atterrissage, j'ai comme qui dirait un peu merdé. Mais attention, l'enquête a dit que c'était pas ma faute. Alors, un gardien, il ne peut pas faire grand chose pour toi, mais moi j'assure comme une bête et encore tu ne m'as pas vu jouer aux jeux vidéo."

Jefferson se planta devant Annah et sortit un petit bout de ficelle ainsi qu'un canif.

"Regardes bien Ephie, je vais te faire un truc au-delà du réel!"

Jefferson exécuta son vieux tour de la ficelle coupée . Il trancha la ficelle, la mit en boule, tira sur une extrêmité pour finalement montrer qu'elle était d'un seul tenant.

"Tantan! Reconnais que là tu es sciée quand même... Pfff, gardien c'est vraiment la misère, tu ne peux même pas prendre le taxi pour aller quelque part, cette bande de crétins ils te voient même pas"

Jefferson fouilla dans ses poches et trouva une barre énergétique au fond de l'une d'elle. Il la tendit en direction d'Annah.

"T'en veux?"

Elle marchait, simplement, les mains dans les poches, son manteau qu'elle avait refermé l'entravant un peu. Elle y avait coincé ses cheveux, et ils la tiraient un peu, mais ça n'avait pas d'importance, au plus vite elle serait chez elle... Au mieux ça serait. Elle leva les yeux vers lui, et sourit. Elle retrouvait son attitude habituelle, plus détendue et légère que l'instant d'avant. Cependant, elle tremblait doucement. C'était là la différence. Ses petits tremblements. Ils n'étaient pas dûs à ses crises. Elle le voyait papillonner tout autour d'elle, avec le regard d'une personne accompagnée d'un enfant hyper actif... Enfin, un enfant plus âgé que la personne en question.

"Non, j'habite plutôt près, en fait... Tout juste à quelques rues"

Elle lui fit un clin d'oeil un peu railleur.

"Tu ne feras pas de crise d'inanition d'ici là. Je te ferais confiance pour le repas, alors..."

Elle en profiterait pour prendre une douche... Pour se délasser un peu. Voyant les efforts qu'il faisait, et voyant que ces efforts n'empiétaient pas sur son "histoire", elle profitait de l'occasion pour dévier le sujet, et le suivre dans ses palabres. Il semblait pouvoir s'agiter sur n'importe quoi, et par chance, elle avait de la répartie lorsqu'il s'agissait de se mettre à l'écoute des autres. Elle ferma les yeux et hocha la tête d'un air déconcerté, puis reporta son regard lui d'un air de défi.

"Aux jeux vidéos? Mouais... Je pourrais sans doute rivaliser"

Elle prit un air un peu hautain, puis se pencha en avant, en marchant, comme si elle tentait de voir au bout de la rue qu'ils venaient de croiser. Elle avait délibérément ignoré le fait qu'il n'était pas comme un gardien normal... Le fait qu'il "pourrait faire quelque chose pour elle". Non, c'était tellement plus intéressant les jeux vidéos... Tellement moins troublant. Elle laissa un léger soupir lui échapper. Ils étaient à une rue tout juste de son domicile, à présent. Elle s'arrêta, un peu surprise, lorsqu'il se mit devant elle pour lui jouer son petit tour. Elle le regarda d'abord faire, un sourcil haussé, puis se pencha un peu vers sa ficelle pour l'examiner de près, une fois le tour fini. Elle ne comprenait pas. Pour cela, les magiciens l'avaient un peu irritée, la plupart du temps. Elle n'était pas d'une curiosité maladive, elle ne craignait pas de ne pas tout comprendre...
Mais ces petits tours de passe-passe, ça la titillait au plus haut point. Elle garda le silence un moment, se triturant les neurones dans tous les sens, puis se redressa.

"M'énerve"

Elle eut un rire un peu gêné, et se remit en marche. Tout en avançant, elle se tourna vers lui pour lui parler.

"Tu m'apprendras ça...? Ah et j'habite juste là, donc j'attendrais que tu ais fait à manger pour me mettre quelque chose sous la dent, merci ^^"

[si tu veux, après ton post, je créé un topic dans "demeures" et tout ^^]

"Ouais, je t'apprendrais en fait c'est facile à faire."

Jefferson regarda l'immeuble où vivait la jeune fille. Il le trouvait un peu grisâtre. Il le trouvait même lugubre.

*Comment des gens peuvent vivre dans un bâtiment comme cà sans se jetter par la fenêtre?*

Jefferson haussa les épaules et se tourna vers Annah, lui sourit et d'une voix ironique lui dit :

"Très chère, j'adore votre architecte personnel, il faudra que vous me passiez son numéro. C'est tout simplement époustouflant, si je n'étais pas mort et que je n'avais pas d'ailes je sauterais de joie par la fenêtre du 5ème étage"

Jefferson éclata de rire, se saisit de la porte d'entrée et la tint grande ouverte, tout en faisant un numéro de claquettes qu'il avait appris à force de se passer en boucle les films avec Sinatra. Il trouvait cà classe et puis il avait vu un groom, les pingouins comme il les appelle, le faire

"Je vous en prie duchesse, le chef se propose de vous faire mijoter le plat du siècle avec les restes du frigo ; prenez place dans votre siège, bouclez vos ceintures, Jefferson Airlines s'occupe de tout"

Il s'approcha de la jeune fille et lui chuchota au moment où elle allait entrer:

"Pour les jeux video, j'attends de voir quand même"

S'apprêtant à lui emboîter le pas dès qu'elle rentrerait, le plus fou des gardiens commenca à chanter "Johnny Be Good" de Buddy Holy en imitant les pas de danse d'Elvis Presley. Il s'amusait comme un fou et semblait bien insouciant des problèmes de ce monde. Il paraissait vouloir profiter de chaque instant de cette deuxième chance et peut-être tout simplement essayer de mettre des couleurs et un petit brin de folie dans la vie de sa protégée.

[ oki je te laisse ouvrir le sujet dans demeur tu es chez toi tout de même^^]